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L'Invasion des profanateurs de sépulture (Invasion of the body snatchers)

Publié le par Rosalie210

Don Siegel (1956)

L'Invasion des profanateurs de sépulture (Invasion of the body snatchers)

"L'invasion des profanateurs de sépulture" (traduction erronée du titre original "L'invasion des voleurs de corps") est l'un de ces films-matrice culte que j'ai découvert par le biais de ce qu'on appelle l'intertextualité au cinéma. En l'occurrence une scène entière de "Retour vers le futur" (1985) qui reprend celle, très célèbre, de l'autoroute. Et si je cite le film de Robert ZEMECKIS c'est parce qu'il a bien compris le sens de celui de Don SIEGEL. La scène en question se déroule au moment où Marty découvre Hill Valley en 1955. Or Hill Valley, comme Santa Mira est une petite ville américaine californienne typique de l'American way of life. Un panneau publicitaire à elle seule. Reste à savoir ce qui se cache derrière. Car ce qui rapproche aussi les deux micro-sociétés, c'est leur repli sur elles-mêmes comme s'il existait une barrière invisible qui les séparaient du reste du monde et comme s'il fallait s'en défendre (si elle devient visible alors on parle de gated community). Pas étonnant que ces communautés à la façade trop lisse pour être vraie soient hautement paranoïaques et si vulnérables à la psychose collective. La figure de l'alien, forcément hostile camoufle la peur encore plus profonde de l'ennemi de l'intérieur, celui qui sans faire de bruit prend possession de vous et vous prive de votre identité. Sauf que ceux qui ont le plus peur d'en être privés sont ceux qui n'en ont pas, ceux qui sont des coquilles vides malléables au lavage de cerveau. Lequel tournait dans les années 50 autour d'une peur primale des rouges et de tous ceux susceptibles d'être "contaminés" par les idées communistes, prétexte à une vaste épuration de la société américaine de ses "indésirables". Car dans son autobiographie, Don SIEGEL est très clair là-dessus. Ce qui menace les habitants de Santa Mira n'est pas le communisme mais l'embrigadement, symbolisé par la production de copies conformes aux originaux, sauf qu'il s'agit d'objets manufacturés et non plus d'êtres humains capables de ressentir et de penser par eux-mêmes. De vrais pantins obéissant aux ordres d'une autorité supérieure (ce n'est pas par hasard qu'il y a tant de flics dans le film). Bref les "cosses de l'espace" désignent en réalité une maladie bien américaine (et bien humaine): la peur panique de la différence, une émotion hautement manipulable. Car derrière son adhésion aux codes du genre de SF de série B, le film de Don SIEGEL est une oeuvre politique très clairvoyante sur la société américaine*.

* Me viennent à l'esprit des films comme "Blue Velvet" (1986) de David LYNCH, "Invasion Los Angeles" (1988) de John CARPENTER, "Edward aux mains d argent" (1990) de Tim BURTON "The Truman Show" (1998) de Peter WEIR qui chacun à leur manière décrivent la face cachée, monstrueuse et dictatoriale de l'Amérique puritaine.

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