Docteur Jekyll et Mr. Hyde (Dr. Jekyll and Mr. Hyde)
Victor Fleming (1941)
"Dr.Jekyll et Mr. Hyde" de Victor FLEMING est le remake du film de Rouben MAMOULIAN de 1931. Il en reprend en effet l’intrigue et de nombreuses scènes quasi à l’identique tout en gommant la plupart de ses aspérités. Le code Hays est passé par là encore que Victor FLEMING ne s’en tire pas si mal en représentant le désir manifeste que Jekyll (Spencer TRACY) a pour sa fiancée Beatrix (Lana TURNER) et qui indispose son père (Donald CRISP) ainsi que quelques visions oniriques assez réussies notamment celle des femmes-chevaux dévêtues fouettées par Jekyll transformé en cocher. Mais Ivy (Ingrid BERGMAN) ne peut plus s’offrir nue à Jekyll puisque la prostitution ne peut pas être représentée frontalement, elle devient donc pudiquement une simple « serveuse » et ce changement rend bancal son personnage jusqu’à la fin (la manière dont elle retrouve Jekyll est particulièrement peu crédible). De ce point de vue on peut considérer cette version comme une rencontre entre deux formes de puritanismes : le victorien et l’américain qui se renforcent l’un l’autre. Le film est par ailleurs une œuvre de prestige très soignée tant au niveau des costumes que des éclairages (la photographie du visage des actrices est superbe) et de l’atmosphère en général (réaliste pour Jekyll et expressionniste pour Hyde) mais la mise en scène est paresseuse par rapport à la version précédente. Autre gros problème, Spencer TRACY n’est pas crédible dans le rôle. Il est trop vieux pour jouer le jeune premier et le choix de créer un Hyde qui n’est qu’une version grimaçante et hirsute de lui-même rend invraisemblable le fait qu’il ne soit pas immédiatement reconnu par son entourage. De plus il est assez insipide en Jekyll là où Fredric MARCH était beaucoup plus tourmenté, laissant transparaître son démon intérieur sous son visage d’ange. Ingrid BERGMAN tire en revanche son épingle du jeu en jouant une Ivy sous l'emprise d'un tyran domestique proche de son futur rôle dans "Hantise" (1944) de George CUKOR.
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