Beetlejuice
Tim Burton (1988)
"Beetlejuice" préfigure "Mars Attacks!" (1997) c'est à dire le côté "affreux, sale et méchant" (et très sarcastiquement drôle) de Tim BURTON. Mais alors que "Mars Attacks!" (1997) est une satire politique, "Beetlejuice" se concentre sur la sphère domestique avec ce qu'on pourrait appeler une bataille rangée pour l'appropriation d'une maison entre deux clans aussi caricaturaux l'un que l'autre:
- D'un côté le couple Maitland (Alec BALDWIN et Geena DAVIS alors tout jeunots) qui incarne l'Amérique profonde, celle qui ne jure que par le "home, sweet home". Cela donne (en caricaturant juste un peu) un couple qui ne rêve que de rester chez lui, y compris pendant les vacances et pour qui "tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil". Eux mêmes le sont tellement (gentils) qu'ils n'osent pas toucher à la décoration vieillotte de leur maison qui est l'œuvre de l'ancienne propriétaire, laquelle œuvre à les en chasser. En effet ils font tache dans le paysage de "L'Américan way of life" car ils n'ont pas d'enfants et donc "la maison est trop grande pour eux". Finalement, les vœux des uns et des autres finissent par se réaliser avec l'accident qui coûte la vie aux Maitland. Ces derniers se retrouvent à l'état de fantômes enchaînés à leur maison pour 125 ans (ils vont en bouffer du "home, sweet home!") alors que l'ancienne propriétaire, débarrassée d'eux va pouvoir choisir des propriétaires plus conformes à ses souhaits.
-Pourtant les Deetz qui leur succèdent ne sont pas non plus les candidats idéaux. Ce sont des néo-ruraux issus de la bourgeoisie new-yorkaise affairiste et branchée. A travers eux, Tim BURTON caricature les élites urbaines avec délectation, que ce soit leur snobisme ou leur recherche du profit. Je pense en particulier à leurs goûts esthétiques discutables que ce soit les sculptures de Delia (Catherine O HARA) ou le réaménagement de la maison façon art moderne sous la direction de Otho (Glenn SHADIX) ainsi qu'à leur réaction intéressée lorsqu'ils découvrent que la maison est hantée. Il n'est guère étonnant que les Maitland fassent un "rejet" de ces nouveaux occupants et cherchent à leur tour à les chasser de la maison.
-Finalement c'est le personnage de Lydia (Winona RYDER) qui représente le terrain d'entente permettant à tous ces gens de cohabiter ensemble. D'une part parce que c'est une enfant permettant aux Maitland de remplir la case "famille" qui leur manquait. D'autre part parce que sa sensibilité gothique lui permet d'entrer en contact avec les fantômes, une excentricité qui plaît aux Deetz, eux qui aimeraient bien faire du business autour de l'aspect macabre de la maison. En revanche, Bételgeuse/Beetlejuice (Michael KEATON qui cabotine à qui mieux mieux) sorte de (mauvais) esprit frappeur, s'il permet d'animer (au sens propre comme au sens figuré) quelques séquences hautes en couleur est bien trop intenable pour pouvoir s'installer à demeure comme le montre l'échec de sa tentative de mariage avec Lydia.
Finalement, il s'agit d'une histoire qui est à l'image d'un film où cohabitent les contraires dans un joyeux bazar: la grosse farce et le macabre, les prises de vue réelles et l'animation, les décors champêtres en extérieurs et les décors de studios qui font penser à l'expressionnisme allemand des années 20, le tout combiné à des effets kitsch typiques des années 80!
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