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Miraï, ma petite soeur (Mirai no Mirai)

Publié le par Rosalie210

Mamoru Hosoda (2018)

Miraï, ma petite soeur (Mirai no Mirai)

Pour les japonais animistes, les arbres sont tellement sacrés qu'ils préfèrent les intégrer à leur urbanisme plutôt que de les couper. Il n'est donc pas rare d'observer leur présence au beau milieu d'une gare, d'une route ou comme dans le film qui nous occupe, d'une maison. Car bien qu'étant issue de l'esprit de son père architecte, la maison de Kun, le héros du dernier film de Mamoru HOSODA est construite en marches d'escaliers (comme si elle épousait une pente naturelle) avec en son coeur, une cour intérieure abritant un arbre. Or cet arbre "généalomagique" contient en lui toute l'histoire familiale. C'est grâce à lui que la crise déclenchée par l'arrivée de Miraï la petite soeur de Kun (qui signifie "avenir") va pouvoir se dénouer. S'ensuit un formidable voyage temporel entre passé, présent et futur, réalité et imaginaire qui permet à Mamoru HOSODA de développer ses thèmes de prédilection: les voyages dans le temps ("La Traversée du temps" (2007)), l'évolution de la famille et les relations entre l'homme, la nature et les esprits ("Summer Wars (2009)", "Les Enfants Loups, Ame & Yuki" (2012), "Le Garçon et la Bête") (2015). Dans tous les cas, l'enjeu est de grandir et de trouver sa place aussi bien dans sa famille et dans le monde. Kun âgé de quatre ans à l'arrivée de sa soeur est particulièrement égocentrique et capricieux, une véritable "tête à claques" comme il se qualifie lui-même une fois devenu adolescent. L'arrivée de Miraï dans la famille déclenche donc en lui une jalousie incontrôlable parce qu'il n'est plus au centre du monde (comme le montre particulièrement bien la scène des photographies). La douleur et la colère le poussent à faire des bêtises, à tourmenter sa soeur voire à se mettre en danger. Sa rencontre avec des membres de sa famille à divers âges de leur vie ainsi qu'avec son chien Yukko métamorphosable en homme sont des jalons essentiels pour l'apaiser et lui permettre de donner du sens à son vécu. La plasticité spatio-temporelle et rêve-réel n'empêche pas le récit d'être limpide. En effet, l'arbre est toujours le déclencheur des événements fantastiques tandis que l'album photo familial permet de replacer chaque voyage dans l'histoire de la famille et de s'interroger sur la part de hasard et de destin dans sa construction. On remarque également que les garçons de la famille ont tous une fragilité entre un grand-père estropié, un père gringalet et un fils en proie à la furie furieuse. Le fait que le père garde les enfants à la maison pendant que la mère travaille dans une configuration semblable à celle des "Les Indestructibles 2" (2018) montre que l'évolution des rôles sexués touche aussi le Japon. Enfin signalons une scène onirique magnifique dans la gare de Tokyo utilisant la technique du papier découpé. Les trains dont raffole Kun sont les principaux véhicules de rêve et d'aventure mais ils peuvent aussi à l'occasion se transformer en cauchemar.

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