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Folies de femmes (Foolish wives)

Publié le par Rosalie210

Erich von Stroheim (1920)

Folies de femmes (Foolish wives)

Même dans les versions plus ou moins écourtées qu'il nous reste du troisième film de Erich von STROHEIM, ce dernier marque l'esprit. Il faut dire que Erich von STROHEIM qui une fois de plus est devant et derrière la caméra ainsi que l'auteur du scénario a vu les choses en grand: son film devait durer plus de six heures. Même à l'époque, cela ne passait pas auprès des studios avec lesquels il était en conflit. Dommage qu'il n'ait pas pu étendre son désir de contrôle à la production et distribution de ses films.

"Folies de femmes" est un film incroyablement moderne de par les thèmes traités mais aussi la manière de les traiter. Erich von STROHEIM est un moraliste (et non un moralisateur) dont le regard caustique est aussi réjouissant que percutant. Il rend visible les stigmates de l'après-guerre que ce soit la crise sociale ou les anciens combattants infirmes pour mieux souligner la facticité et le parasitisme du petit milieu mondain qu'il dépeint (Monte-Carlo, un paradis fiscal, rien de neuf sous le soleil). Un milieu oisif, corrompu et décadent obsédé par l'argent et le sexe. Erich von STROHEIM dans l'un des rôles les plus mémorables de sa carrière interprète Karamzin, faux comte russe ayant vraisemblablement usurpé ses décorations militaires mais vrai escroc et surtout redoutable prédateur sexuel. Dans le film, il court trois lièvres à la fois. Son oeil-caméra nous offre des plans voyeuristes saisissants des pieds et jambes de ses victimes (un fétichisme assumé que l'on retrouve de film en film) mais aussi du buste maté sournoisement à l'aide d'un miroir. La lâcheté du personnage n'a d'égale que sa perversion. Il n'attaque que des proies d'un statut social inférieur au sien ou bien handicapées (les premières victimes de viol encore de nos jours) ou endormies et isolées. Cette lâcheté combinée à son hypocrisie le rendent ridicule et pitoyable, sauf aux yeux de ses victimes qui se laissent prendre à ses larmes de crocodile (ou plutôt des gouttes de thé s'écoulant d'un bout de mouchoir caché dans sa main). Car le regard moraliste de Erich von STROHEIM trouve des relais dans le film auprès d'autres regards: celui du moine qui le prend en flagrant délit de tentative de viol et le tient en respect tout au long de la nuit, celui du soldat infirme et celui du faux monnayeur qui le remet à sa vraie place: dans l'égout.

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