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OSS 117: Le Caire, nid d'espions

Publié le par Rosalie210

Michel Hazanavicius (2006)

OSS 117: Le Caire, nid d'espions

Il est beauf, suffisant, raciste, macho, ignare, en un mot il est bête à pleurer… de rire, l'agent secret frenchie Hubert Bonisseur de la Bath (Jean Dujardin) alias OSS 117. Mais si Hubert est bas de plafond, le film de Michel Hazanavicius pétille d'intelligence. En effet, comme toute reconstitution historique qui se respecte, y compris dans la comédie, il joue sur deux tableaux ou plutôt deux temporalités. D'une part, celle de la narration qui nous plonge dans le contexte du milieu des années cinquante quand la France s'illusionnait encore sur sa puissance coloniale en Afrique peu de temps avant sa première déculottée dans la crise de Suez. De l'autre, celui du tournage cinquante ans plus tard qui permet de transformer la figure d'une colonisation autosatisfaite et aveugle en punching ball pour les anciens colonisés. On goûtera par exemple l'échange savoureux avec le contremaître égyptien que Hubert tutoie et traite de façon paternaliste et condescendante. Lorsqu'il lui demande combien il a d'enfants (les indigènes étant perçus comme des lapins se reproduisant à toute vitesse), le contremaître lui répond qu'il en a deux et un peu plus tard lorsque Hubert lui dit qu'il va acheter des chaussures pour eux, il répond que ce n'est pas possible car ils terminent leurs études à New-York. Les phrases de Hubert datent des années cinquante, celles du contremaître des années 2000 ce qui créé un décalage comique jouissif que l'on retrouve aussi dans le domaine de la religion ou des femmes.

Le jeu sur le décalage temporel se retrouve aussi dans la forme. "OSS 117: Le Caire, nid d'espions" ressemble à un pastiche à la fois élégant et grotesque des films d'espionnage exotique des années cinquante. Tout sonne faux, du jeu outrancier des acteurs allant avec leurs personnages caricaturaux jusqu'aux décors de carton-pâte et aux trucages cheap. Mais derrière cette apparente grossièreté de série B (voire Z), il y a énormément de soin apporté à la reconstitution des films de cette époque, des inscriptions en surimpression des plans-clichés de villes jusqu'au travail sur la couleur avec des contrastes qui donnent un rendu technicolor très convaincant. On se croirait dans un "James Bond" de la période Sean Connery ou dans "L'Homme qui en savait trop" d'Hitchcock (d'autant que les transparences dans les scènes filmées à l'intérieur d'une automobile étaient l'une de ses marques de fabrique). Et l'outrance de certaines scènes comme celles des flashbacks édéniques entre "amis" (qui font penser à certains moments à du soap opera) est profondément ironique, surlignant l'homosexualité refoulée des personnages masculins par la censure/autocensure de l'époque. 

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