Le Géant de fer (The Iron Giant)
Brad Bird (1999)
"Le Géant de fer" est le premier long-métrage d'animation de Brad Bird. En 1999, celui-ci ne travaillait pas encore chez Pixar mais l'intelligence du propos, les différents niveaux de lecture et le soin apporté à la réalisation annoncent "Les Indestructibles et "Ratatouille". Cependant à l'époque les studios Warner qui souhaitaient fermer leur branche animation ont sabordé la carrière du film en salles. Avant que celui-ci ne prenne une revanche éclatante et méritée en devenant un film-culte au fil des années. Le Géant de fer est d'ailleurs une des guest star les plus mises en avant dans le dernier Spielberg "Ready Player One".
La peur de la guerre atomique et par extension de l'URSS a engendré dans les années 50 une paranoIa anticommuniste qui s'est traduite entre autre par le maccarthysme et la construction d'abris antiatomiques. Sur le plan de la culture populaire, des quantités phénoménales d'oeuvres de science-fiction évoquant l'invasion d'extra-terrestres supérieurs technologiquement et hostiles à l'homme sont apparues, le plus souvent sous forme de comics ou de films de série B (voire Z). Parmi elles, citons la "Guerre des mondes" de Byron Haskin en 1953, "L'invasion des profanateurs de sépulture" de Don Siegel en 1956 qui imaginent le grand remplacement des hommes par les aliens. Ces films et comics ont été génialement parodiés dans le premier volet de "Retour vers le futur". Cependant, dès cette époque, des films à contre-courant de la pensée dominante apparaissent comme "Le jour où la Terre s'arrêta" de Robert Wise sorti en 1951 où l'extraterrestre et le robot sont porteur d'un message pacifiste.
C'est exactement à l'intersection de ces deux courants que se situe le "Géant de fer". Tout comme ses deux illustres précédesseurs, "Le Roi et l'oiseau" de Paul Grimault (1980) et "Le Château dans le ciel" d'Hayao Miyazaki (1986), il met en scène un robot géant ambivalent, à la fois arme de destruction massive et protecteur de la nature. "Le Géant de fer" évoque aussi de manière très puissante "E.T. L'extra-terrestre" de Spielberg. Celui-ci a posé un regard bienveillant sur "l'Autre" dès "Rencontre du troisième type" en 1977, établissant via François Truffaut un parallèle entre l'alien et l'enfant. L'amitié entre le Géant et Hogarth est proche de celle d'E.T. et Elliott. Ce dernier vit dans une famille monoparentale, est en mal d'affection, cherche à protéger son ami dans une grange et dans la forêt, est en lutte contre les autorités qui veulent le manipuler pour mettre la main sur l'extra-terrestre.
Mais Brad Bird approfondit plus la question du père que Spielberg. Dans le "Géant de fer", Hogarth Hughes se retrouve face à plusieurs figures paternelles. Il y a son père biologique qui est aviateur comme Howard Hughes (la proximité du patronyme n'est pas un hasard). Hogarth le considère comme un modèle car il porte souvent un casque de pilote sur la tête mais ce père est tragiquement absent. Il y a ensuite Kent Mansley l'agent du gouvernement hystérique et parano qui représente un repoussoir absolu. Sa folie autodestructrice échappant à tout contrôle n'est pas sans rappeler celle du général Jack D. Ripper dans "Docteur Folamour". Et enfin il y a Dean, un beatnik vivant en marge de la société comme sculpteur-ferrailleur et qui va s'avérer être le père idéal pour sauvegarder l'enfant et son ami géant. Le fait qu'il remplace le père disparu est suffisament subversif pour être souligné.
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