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Frantz

Publié le par Rosalie210

François Ozon (2016)

Frantz

"Frantz" est un jeu. Il n'est même en réalité que cela. C'est pourquoi il ne faut pas trop le prendre au sérieux en dépit de sa reconstitution historique léchée de l'après-guerre et des thèmes graves qu'il feint d'aborder.

- Son titre joue habilement sur la phonétique du mot "France" pour illustrer le rapprochement franco-allemand.

- Il y a une énigme à résoudre (quel était le lien entre Frantz et Adrien Rivoire?) puis cette énigme se transforme en un labyrinthe d'illusions, de mensonges, de faux-semblants dans laquelle l'héroïne finit par se perdre (et nous perdre avec elle).

- Jeu enfin avec les genres, les références et les codes. Dans sa vaste garde-robe, Ozon a choisi le mélodrame à la Sirk ("Le temps d'aimer et le temps de mourir") en l'amputant de sa partie mélo. Il s'inspire librement d'un film de Lubitsch de 1932 "L'homme que j'ai tué" ("Broken Lullaby" en VO) lui même inspiré de la pièce de théâtre éponyme de Maurice Rostand écrite peu après la première guerre mondiale. Mais il détourne ce plaidoyer pacifiste et humaniste de son sens. Enfin il joue sur l'opposition entre un noir et blanc austère faisant penser au "Ruban blanc" d'Haneke et quelques passages en couleurs censés représenter des moments de retour à la vie des protagonistes. Ben non en fait, c'était encore un chausse-trappe. A moins de prendre au sérieux l'héroïne lorsqu'elle déclare que le tableau du suicidé de Manet lui donne envie de vivre. Qu'est ce qu'on s'amuse!

L'ennui est en effet que tout ce dispositif à la fois ludique et cérébral sent trop l'exercice de style au détriment de l'âme, du cœur et des tripes (ou dit autrement, d'un soupçon d'authenticité et de bon sens). La seule émotion dégagée par ce film provient de l'interprétation magnifique de Paula Beer. Mais elle est bien seule face au personnage de Pierre Niney, pas crédible en soldat traumatisé et dont le mystère cache surtout l'inconsistance. La mise en scène distanciée, la photo glaciale et l'absence de profondeur du scénario (il s'agit davantage de paraître intelligent que d'être vrai) achève de transformer le film en nature morte rébarbative ou en mélodie truffée de fausses notes.

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