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Le Massacre de Fort Apache (Fort Apache)

Publié le par Rosalie210

John Ford (1948)

Le Massacre de Fort Apache (Fort Apache)

La conclusion de ce film célèbre, le premier de la "trilogie de la cavalerie" de Ford, fait penser à la fameuse citation de "L'Homme qui tua Liberty Valance": "Quand la légende dépasse la vérité alors on imprime la légende."

Mais la vérité et la légende ne se trouvent pas forcément là où on les attend. Ford s'est inspiré d'un événement historique réel transformé en mythe national: la bataille de Little Big Horn en 1876 où le général Custer fut défait par les Sioux. Tout en réaffirmant la nécessité des mythes dans la construction d'une nation, Ford rétablit un certain nombre de vérités humaines qui font la richesse de son film, par ailleurs d'une beauté et d'une majesté à couper le souffle.

Il paraît que fasciné par Dickens, Ford aurait exigé que chaque personnage possède une biographie complète. Cela se ressent tant les portraits des principaux protagonistes sont fouillés. Et celui du général Custer (alias Owen Thursday dans le film) dynamite complètement l'image du héros national forgé par la mémoire collective. Thursday se rapproche plutôt des généraux des "Sentiers de la gloire" de Kubrick. Comme eux, c'est un psychorigide autoritariste qui n'écoute personne et envoie ses hommes à la mort autant par orgueil que par mépris de classe. Quant à l'adversaire indien, il éprouve à son égard un racisme qui justifie toutes les bassesses à leur égard. Henry Fonda n'a pas attendu Sergio Leone pour endosser un rôle qui est à la fois antipathique et pathétique: son "héroïsme" est autant fait de bêtise que d'inconscience et ressemble à un suicide collectif.

A l'opposé, le capitaine Kirby Roy, un sous-fifre de l'ombre, est montré comme un modèle d'humanisme et de pragmatisme, un homme de terrain, un homme ouvert, un homme respectueux et humble, un diplomate et un pacifiste plutôt qu'un homme d'action (ce qui lui vaut d'être traité de poltron, un grand classique de la manipulation psychologique devant le refus d'obéir aux ordres que l'on retrouve aussi dans les "Sentiers de la gloire"). Et c'est John Wayne qui endosse ce rôle de sage, un Wayne impeccable de sobriété dont l'aura ne cesse de grandir au fur et à mesure que le comportement individualiste et obtus de Thursday devient de plus en plus insupportable. Je ne cesse de clamer de film en film mon admiration pour ce grand acteur qui est à l'opposé des clichés forgés par ses (stupides) détracteurs.

Enfin les indiens sont anoblis par la caméra de Ford. Cochise et ses troupes apparaissent comme des hommes dignes dont les revendications sont légitimes et qui ne se battent que pour défendre leurs droits. Ford démontre de façon éclatante que la guerre se retourne toujours contre ceux qui l'ont provoquée alors qu'elle s'éteint d'elle-même face à ceux qui la refusent.

Loin des clichés qui ont forgé la réputation de ce cinéaste.

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