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Summer Wars (Samā wōzu)

Publié le par Rosalie210

Mamoru Hosoda (2010)

Summer Wars (Samā wōzu)

Lorsque l'artiste plasticien Takashi Murakami a exposé ses œuvres dans les grands appartements et la galerie des glaces à Versailles en 2010, les dents ont grincé. D'un côté le classicisme, la tradition, de l'autre l'art contemporain inspiré de l'esthétique manga avec ses personnages acidulés et kawai, le choc des cultures était assuré.

Or c'est à cette même période que "Summer Wars", le deuxième long-métrage d'auteur de Mamoru Hosoda arrive chez nous, suscitant sur le moment des avis plutôt mitigés voire négatifs, notamment sur le graphisme d'Oz, l'univers virtuel, proche de celui de Takashi Murakami. Hosoda a été depuis reconnu en France comme un auteur majeur de l'animation japonaise avec "Ame et Yuki, les enfants-loups" et par conséquent "Summer wars" a été réévalué.

L'un des thèmes centraux de "Summer Wars" est la confrontation entre la tradition et la modernité. Le titre fait allusion aussi bien aux guerres féodales entre samouraï et shogun qu'à la cybercriminalité contemporaine. Il contient en plus un paradoxe qui annonce son caractère fondamentalement divertissant, l'été étant plus propice à la farniente qu'au combat.

La tradition est incarnée par le clan Jinnouchi, une très vieille famille vivant près de Nagano dans une immense demeure et s'étant réunie pour fêter le 90eme anniversaire de leur bisaïeule. Leur histoire reflète celle du Japon: guerriers samouraï au Moyen-Age, ils se sont reconvertis en marchands de soie sous l'ère Meiji avant d'être ruinés par leur de leurs membres. Lorsque le héros, Kenji débarque dans cette immense famille, il découvre que ses membres exercent des métiers variés: pêcheur, policier, joueur de baseball, informaticien etc.

Face à la tradition, la modernité est incarnée par Kenji mais aussi par le monde virtuel d'Oz. Kenji est un jeune lycéen japonais surdoué en mathématiques. Il vit dans un petit appartement, sa famille, vraisemblablement réduite brille par son absence et il passe l'essentiel de son temps à geeker. C'est par lui que l'on découvre que le web est devenu un véritable monde parallèle dans lequel chaque personne possède un avatar, peut travailler, acheter, jouer comme dans le monde réel. Mais une nuit, il craque sans le savoir le code d'Oz, permettant à une I.A malveillante, "Love machine" de s'emparer de façon exponentielle des comptes utilisateurs de particuliers mais aussi d'entreprises et d'administrations. La société réelle est totalement désorganisée ce qui révèle sa dépendance vis à vis des hautes technologies (la réalité a depuis rejoint la fiction avec le logiciel wannacry qui a touché une grande partie du monde et désorganisé des pans entiers de l'économie et de la société). Love machine n'a plus qu'à programmer la fin du monde en faisant tomber un satellite artificiel sur une centrale nucléaire.

Tradition et modernité s'entremêlent lorsqu'on découvre que le créateur de la Love machine est Wabisuke, le vilain petit canard du clan Jinnouchi, marginalisé par son origine illégitime et que la maison du clan est dans le périmètre de chute du satellite. Cette opposition entre une menace planétaire et un point de vue domanial fait penser à "Mélancholia" de Lars Von Trier. On pense aussi un peu à "Matrix" (même si Oz à l'image de sa référence magique est autrement plus coloré et joyeux que l'alignement austère de chiffres sur fond vert de la matrice.) et à "Docteur Folamour". Les spécialistes des mangas et jeux vidéos penseront eux plutôt aux "War games."

Les thèmes sont graves mais le ton reste léger car l'humour est omniprésent et le rythme, très enlevé sans parler du graphisme. C'est frais et pétillant comme une boisson estivale!

 

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