Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

La scandaleuse de Berlin (A Foreign Affair)

Publié le par Rosalie210

Billy Wilder (1948)

La scandaleuse de Berlin (A Foreign Affair)

La scandaleuse de Berlin, septième film de Wilder tourné entre 1947 et 1948 est un tournant dans la filmographie. Pour la première fois, il superpose avec brio plusieurs genres et plusieurs thèmes: la comédie vaudevillesque (le triangle amoureux), le documentaire naturaliste (la survie dans les ruines de Berlin qui fait penser à "Allemagne année 0" à cause de la crudité des plans), le récit initiatique (la métamorphose de Phoebe Frost), le choc des cultures (américaine et germanique), la satire grinçante de l'occupation américaine et de la dénazification (l'occasion de gags bien sentis), la tragédie sous-jacente (les ravages de la guerre d'anéantissement).

On a souvent comparé la Scandaleuse de Berlin à Ninotchka dont Billy Wilder écrivit le scénario. Phoebe Frost (jouée par Jean Arthur) peut en effet être considérée comme une cousine yankee de l'héroïne communiste d'Ernst Lubitsch. Psychorigide jusqu'au bout des ongles elle vient à Berlin en tant que dirigeante d'une délégation du Congrès américain. Son rôle est de surveiller et de regonfler si nécessaire le moral des troupes. Elle va découvrir une réalité aux antipodes de ses principes (marché noir, prostitution...) et qui va produire sur elle une vraie métamorphose. Deux personnages jouent un rôle essentiel dans cette transformation: le capitaine Pringle (John Lund), un homme un peu faible et veule dont elle tombe amoureuse. Et Erika von Schlütow, une chanteuse de cabaret jouée par une Marlene Dietrich impériale tout droit sortie de chez Sternberg. Erika est l'antithèse de Phoebe, une femme marquée, désabusée, qui renvoie l'américaine naïve à ses utopies de petite fille et met en échec ses préjugés. C'est une femme dont le seul principe est l'instinct de survie. Ex-maîtresse d'un nazi en fuite, elle s'est reconvertie dans les bras du capitaine Pringle en échange de faveurs matérielles. Pringle séduit Phoebe pour faire diversion puis tombe amoureux d'elle mais ne peut rompre avec Erika. Il est en effet manipulé par l'armée qui cherche ainsi à coincer Brigel, l'ancien amant nazi d'Erika. Lorsqu'elle le découvre, elle conserve une dignité inébranlable.

Marlene Dietrich était très réticente au départ à l'idée de jouer ce rôle mais elle avait confiance en la capacité de Wilder à la sublimer (comme il l'a fait plus tard pour Audrey Hepburn et Marylin Monroe). Aux dialogies ciselés, à l'interprétation remarquable et aux images chocs, il faut également rajouter le brio de la mise en scène. La scène où Phoebe, troublée par le capitaine essaye en vain de se protéger en utilisant (en vain) les casiers des fichiers comme obstacles entre elle et lui trouve en bel écho dans la scène finale où le capitaine un peu honteux de sa conduite essaye d'échapper cette-fois ci à une Phoebe énamourée en dressant des chaises entre lui et elle.

Commenter cet article